Les frères du curé Alexis-Henri Coutu, fondateur de la paroisse de Saint-Donat, sont au nombre de ceux qui ont tenté leur chance dans la recherche du précieux métal jaune. Ils le feront du côté des États-Unis. Léandre et Césaire Coutu de Sainte-Élisabeth sont depuis 1856 en Californie. Ils reviennent de leur périple en septembre 1869. Peu de temps après leur retour, Césaire qui ramène avec lui un joli magot, se marie à St-Didace à Julie Lambert et va résider à St-Elie de Caxton dans le comté de St-Maurice où il y ouvre un magasin général. Ce n’est que vers 1880 que Césaire rejoint ses frères dans la paroisse de Saint-Donat. Ce goût de l’aventure et du risque, Césaire l’aura sûrement transmis à un de ses fils, Fernando. Ce dernier, avec son cousin Jean Lavoie qui a épousé la soeur de Léandre, quitte vers 1897 pour le Klondike au Yukon. Après y avoir demeuré 9 ans, Fernando rapporte quelques 500.$ ce qui n’est pas négligeable à l’époque. Malheureusement, à leur retour Jean Lavoie décède (1). Je ne sais si c’est l’expérience de la famille dans le domaine minier qui l’influence, mais voilà que le curé Alexis-Henri Coutu s’intéresse lui-même à la chose pour Saint-Donat.
En 1881 le journal Le Nord de St-Jérôme reproduit une lettre de ce dernier adressée au curé Antoine Labelle de Saint-Jérôme. Le curé Coutu lui fait part de la découverte non pas de l’or, mais de pierre meulière (2). Il a déjà fait évaluer des fragments de cette pierre par un facteur de meule, un monsieur Varin, qui la trouve très semblable à celle qu’il utilise. Cette pierre provient d’une montagne située à 10-12 milles au nord-ouest de la chapelle au pont Coutu. Encore une fois, il semble ne pas y avoir eu de suite. Les premiers prospecteurs de la mine de quartz !
Voyons voir d’abord ce qu’est le quartz. Le quartz est en fait une forme de silice. Il entre dans la composition d’abrasifs, du papier sablé, dans la fabrication de la vitre, comme ingrédient dans le savon de nettoyeur à main, dans la porcelaine, etc. La montagne de la Croix représente un énorme dépôt de quartzite qui s’étend non seulement vers le terrain de golf, mais également du côté du village et jusque sous le lac Archambault. M. Julien Beauchamp, aujourd’hui décédé a été le premier à me raconter les débuts de la mine de silice et m’a même parlé de ceux qui y ont prospecté bien avant son ouverture officielle en 1954. Aux dires de Julien, ce serait Félix Lafleur (marié à Joséphine Piché) qui aurait le premier prospecté dans cette montagne au cours des années 1920. Ce qui m’a été confirmé par un des enfants de Félix, Gilbert Lafleur (marié à Marie-Alda Juteau). À cette époque, Félix travaille à l’occasion pour des prospecteurs du gouvernement, de même que Henri et Hervini Beauchamp, le frère et l’oncle de Julien. Suite probablement à son expérience de travail, Félix semble-t-il aurait fait quelques trous sur la montagne pour extraire du minerai qu’il aurait transporté en voiture à cheval jusqu’à la gare de Sainte-Agathe pour le faire analyser à Montréal. Il aurait même "claimé" (3) une partie de terrain. Gilbert se souvient que son père lui a fait part qu’un petit groupe d’hommes, dont Félix, Athanase Berthiaume, Désiré Deslauriers, Jos Ritchie et sans doute d’autres, se seraient associés pour faire l’exploitation du quartz. Les trois dernières personnes avaient des propriétés à même la montagne. Ceci aurait occasionné d’ailleurs des difficultés lors de l’arrivée de la compagnie minière au sujet des droits de propriété. Ils ne sont pas les seuls à avoir sondé la montagne. M. Georges Blix, qui sera le premier gérant à l’ouverture de la mine, me disait lors d’une entrevue que les Pères St-Sacrement avaient creusé quelques trous sur la montagne et ils étaient encore visibles à son arrivée. Cela remonterait avant 1939. Ils cherchaient de l’or disait-il ! De plus, en 1939 des gens de la compagnie de chemin de fer C.P.R seraient venus à Saint-Donat faire des essais près du ski-to Gagné (derrière le stationnement du Parc des Pionniers). Le mois prochain, nous verrons comment a commencé l’exploitation de la mine en 1954.
(1) Gaudet, Sylvain . Société Historique de Saint-Donat. Un moulin et son village celui des Coutu à Saint-Donat de Montcalm. 1982. (2) Pierre meulière : Pierre à surface rugueuse, variété de calcaire silicieux employée en maçonnerie. (3) Claimer : Demander un privilège d’exploiter une ressource minière. Information : Pour ceux et celles que l’histoire et le patrimoine intéressent, je ferai une présentation le dimanche 19 février 1995 à la bibliothèque municipale de Saint-Donat à 14h dans le cadre " Les dimanches après-midi à la bibliothèque". Il sera question entre autres d’une ballade à travers des images d’antan, de séquences de films d’autrefois d’ici et d’ailleurs et un petit mot sur ma profession d’anthropologue et sur le potentiel touristique que peut représenter le patrimoine dans un village. Photo-vignette : Félix Lafleur est celui qui est debout. Assis sur la chaise, un dénommé Leroux un pensionnaire. Félix épouse le 29 octobre 1901 à Sainte-Agathe-des-Monts Joséphine Piché.
Il vient s’établir au début du siècle au lac Archambault là où se trouve aujourd’hui le Centre d’accueil des 4 Vents.
Source : Claude Lambert, anthropologue-historien, Journal Altitude 1350. Février 1995