Des événements tragiques, il en arrive dans tous les villages. L’été 1927 fut très éprouvant pour les familles de cinq jeunes garçons âgés entre 9 et 16 ans qui se sont égarés en forêt lors de leur séjour au Camp Agaming au lac Archambault, mieux connu sous le nom du Powter’s Camp.
Excursion au lac Aubin. Le 15 août de cet été, un groupe de 7 à 8 jeunes se dirige en excursion au lac Aubin pour y camper. Arrivés sur les lieux, 5 des jeunes garçons demandent la permission de partir à la recherche d’un lac qu’ils croient être près de leur campement. Ce qui leur est accordé. Ils empruntent alors un sentier qui semble bien tracé, et tout le monde s’attend à les revoir bientôt. Mais à l’heure du souper, les enfants ne sont pas encore revenus. Le lendemain matin, mardi, les garçons ne sont pas toujours de retour. L’alerte est donc donnée au Camp Powter. Déjà, sur les bords du lac Aubin, des coups de feu sont tirés pour diriger les enfants disparus. Au cours de cette même journée on découvre sur une piste par où les enfants ont passé, un message qu’ils ont accroché à un arbre et qui dit : “ Nous, les garçons du camp Agaming sommes perdus”.
Les secours s’organisent. Aussitôt, la population de Saint-Donat est avertie du drame et des équipes de recherche sont mises sur pied. Elles sont sous la direction de Wilfrid Pinard de la St-Maurice Paper, Omer Tellier et Hector Bilodeau alors secrétaire-trésorier de la municipalité. À la demande du chef Lorrain de la Sûreté provinciale à Montréal, le chef de police Bergeron de Ste-Agathe-des-Monts ainsi qu’un collègue le sergent Alphonse Nantel se déplace vers St-Donat pour participer aux recherches. La nouvelle est déjà rendue à Saint-Michel-des-Saints où un groupe d’hommes, bûcheron, trappeur, garde-chasse et garde-feu se dirigent vers Saint-Donat pour rejoindre l’autre groupe qui vient à leur rencontre en ratissant la forêt. Le vendredi, deux avions de la compagnie “Fairchild Aviation Limited” de Grand-Mère et un autre du Royal Air Force du Canada arrivent au lac Archambault pour prêter leur secours. Au cours de leur survol de la région, ils laissent tomber dans les bois plusieurs centaines de billets portant le message suivant aux enfants : “...de se diriger vers une éclaircie, y faire du feu, d’agiter vos chemises et demeurer au même endroit jusqu’à ce que les secours arrivent”. Au village de Saint-Donat tous les citoyens ne font que discuter de cette tragédie. Nouvellement fondée, la Compagnie de Téléphone de St-Donat ne cesse de diriger les appels vers l’extérieur tant pour les familles éprouvées que pour coordonner les recherches. Mme Lucienne Thibault Lauriault se souvient de tout le branle-bas que cela a provoqué dans le petit village. Elle se souvient du va-et-vient que cela occasionnait au central téléphonique tant le jour que la nuit.
Enfin le dénouement. Après avoir passé 3 jours et 3 nuits dans la forêt, les 5 garçons sont retrouvés aux environs du lac Cyprès. C’est le groupe de Exalaphat B. Charbonneau qui a répondu aux appels qu’ils lançaient dans les bois. Les jeunes avaient emprunté d’anciens sentiers que les guides remontaient. Lorsque les enfants sont retrouvés le plus jeune, âgé de 9 ans est très faible et ne veux que dormir. Les autres garçons ont tout de même bonne mine. Les hommes doivent transporter le plus jeune tout le long du trajet du retour jusqu’a la ferme de Arthur Lafond au Pembina. Arrivés au camp Powter, parents, amis, chercheurs et citoyens de St-Donat les accueillent. Quand on leur demande pourquoi ils n’ont pas fait de feu, les garçons répondent qu’ils n’avaient plus d’allumettes. Quant aux avions, ils les ont bien aperçus et leur ont même fait des signes, mais ceux-ci ne les ont pas vus. Durant leur séjour en forêt ils racontent qu’ils n’ont pas eu tellement froid et que pour la nourriture ils mangeaient des fruits sauvages. Ils ne refusèrent cependant pas les “beurrées de beurre” et les pommes que leur offraient leurs sauveteurs.
Notes : La majorité des informations sont tirées des journaux de l’époque et de Mme Exalaphat B. Charbonneau née Marguerite Gaudet que je tiens à remercier.
Photo-vignette : C’est Exalaphat B. Charbonneau, celui à droite qui le premier aperçut les enfants. Il est accompagné de Jules Michaudville. Exalaphat reçut $ 50.00 pour avoir trouvé les enfants. L’automne approchant, il s’acheta avec ce montant un “quart” de lard, 6 poches de fleur et autres articles de nécessité. Le plus jeune des enfants, Avard Forsyth, que l’on voit au centre de la photo à peine à tenir debout parce que trop épuisé. Les autres sont : James Dorrance 13 ans, Owen Frederick 10 ans et demi, Henry Findlay 11 ans et Kenneth Wray 16 ans.
Source : Claude Lambert, anthropologue-historien, Journal Altitude 1350. Novembre 1992