À l’été 1914, Thomas Wall et son fils Harold quittent leur chalet situé entre,Ste-Lucie et Ste-Marguerite pour rendre visite à Tom Wall qui séjourne au Camp Powter’s. Voyageant en boghei, conduit par un fermier, Thomas fut ébahi par le paysage qui s’offrait à lui en arrivant à proximité du lac Archambault. À cet endroit, Jos Régimbald avait défriché un vaste lopin de terre pour y installer sa ferme permettant une vue splendide sur le lac et la montagne qui faisait face.
De retour chez lui, Thomas Wall entreprit des recherches dans le but d’acquérir du terrain dans la partie sud du lac Archambault. Peu de temps après, il achète une partie de la ferme de M. Régimbald. L’enthousiasme du père Wall se transmet à son frère Bob et son cousin Harry, avec lesquels il forme une association qui leur permet d’acquérir d’autres terrains reliés à l’achat initial. En tout la propriété atteint 996 acres avec ½ mille de front sur le lac.
Dès 1916, Thomas conçoit l’idée d’y ériger de petites villas. C’est à M. Jos Gagnon, habile constructeur de St-Donat, que revient le contrat. Dans les hivers 1916-1917, plusieurs petites villas furent construites à l’endroit qui avait ébloui Thomas Wall, soit à environ ½ mille du lac Archambault Cette première construction fut suivie de près par d’autres jusqu’en 1925, notamment un édifice central de 30 chambres avec cuisine, salle à dîner, salon de détente et de divertissements, le tout formant ce que l’on dénomma le Chalet St-Donat.
Même si le promoteur était convaincu que la vue splendide allait devenir une attraction pour les vacanciers, il s’avéra que le sentier en descente de ½ mille pour atteindre la plage allant devenir un élément dissuasif pour la clientèle. Aussi, avec les années, les partenaires perdirent leur enthousiasme et Thomas Wall a dû racheter leurs parts. Plusieurs facteurs rendirent difficiles les opérations de ce projet durant les premières années. D’abord le chemin Prévost qui reliait à l’époque St-Donat à Ste-Agathe était difficilement carrossable même pour les Ford T. Pour s’approvisionner en eau, il fallait en transporter par barils à partir de la source de la ferme Régimbald. Coupé du monde extérieur, sans communications téléphoniques, il a fallu attendre en 1926 pour bénéficier de ce service quand Messieurs Jos Thibault, et Hector Bilodeau mirent sur pied la Compagnie de Téléphone St-Donat inc.
Enfin, ce n’est qu’en 1947 que l’électricité fournie par la Coopérative locale mit fin à l’usage primitif des chandelles, puis de la lampe à l’huile suivie de la lampe Aladin et de la lampe à naphta Coleman. Les riches professionnels et commerçants de langue anglaise de la métropole constituèrent la première clientèle du Chalet St-Donat. Petit à petit, des annonces publiées dans le « New York Times » et dans plusieurs agences de publicité d’importantes villes du nord des États-Unis attirèrent une clientèle américaine. En septembre 1925, un groupe d’environ 90 membres appartenant au « Appalachian Mountain Club of Boston » résidèrent durant 10 jours au Chalet. Le voyage en train de Boston-Montréal exigea des wagons-lits puis de Montréal-Ste-Agathe, on a dû ajouter des wagons-passagers et enfin, 25 voitures ont pris la route vers St-Donat. On fit appel à des cuisiniers de la compagnie de chemin de fer Canadian Pacific Railroad, ainsi qu’à des femmes de chambre et des aide-cuisiniers supplémentaires. Paraît-il que parfois, lorsqu’on manquait de places en hébergement, on louait la petite école de la Corniche pour suppléer aux besoins. Durant 10 ans, à compter de 1931, l’opération du Chalet St-Donat fut gérée par une firme de location. En 1936, Thomas Wall décède et ce sont les 3 enfants qui prirent la relève en 1942. Toutefois, les mesures de guerre décrétées par le gouvernement fédéral empêchèrent les propriétaires de trouver des employés pour faire fonctionner l’entreprise familiale. Au printemps 1949, le Chalet St-Donat fut vendu après qu’on eut transformé les villas en chalets avec poêle et réfrigérateur. Toutefois, les Wall conservèrent le grand chalet construit au bord de l’eau pour leur usage personnel. C’est ce chalet, construit en 1926, qu’on nomma Weatamoo Lodge, qu’une famille de Great Neck de Long Island en Nouvelle-Angleterre habita plusieurs années durant. Également, une personnalité de renommée mondiale, Helen Keller, y séjourne avec son professeur Mme Anne Sullivan Macy en 1936. Finalement, en 1974, M. Adelson se porta acquéreur de l’endroit.
Source : Les écrits d’Harold Wall, février 1977.
P.S. Helen Keller, aveugle et muette de naissance, vit le jour en 1880 à Tuseumbia, Alabama. Malgré son handicap, Mme Keller fut une écrivaine et une conférencière de renom qui obtint un diplôme universitaire. Sa détermination a suscité l’admiration, principalement aux États-Unis. Auteur de 12 livres et de nombreux articles, elle fut décorée de la prestigieuse « médaille présidentielle de la Liberté ». Décédée en 1968 elle est enterrée à la cathédrale nationale du Washington. Weatamoo est le nom d’une tribu indienne de la Nouvelle-Angleterre.
Source : Pierre Forget, Journal Altitude, décembre 2011