Religieuses de Saint-Donat en mission en Alaska

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Dernièrement, en mettant de l’ordre dans mes notes de cours universitaires je suis tombé sur les moeurs et coutumes des Inuits communément appelés Esquimaux. Voilà que je me suis souvenu d’un livre qu’une lectrice m’avait déjà signalé. Le titre, très évocateur, est VOIX D’ALASKA. Il paraît une première fois en 1930. Il raconte l’histoire de la fondation de la mission de Holy Cross à travers les mémoires de Soeur Marie-Joseph Calasanz de la communauté des Soeurs de Sainte-Anne. Vous vous demandez sans doute quel est le lien entre ce livre et Saint-Donat ? J’y arrive.

En 1888, à la demande du Rév. Père Tosi, l’abbé Jonckau du diocèse de Victoria en Colombie Britannique sollicite le secours des Soeurs de Sainte-Anne pour oeuvrer comme missionnaires en Alaska. Parmi les trois religieuses qui partiront pour Holy Cross se trouve Soeur Marie-Pauline, née Délima Brault. Délima est la fille de Elie, premier secrétaire-trésorier de la municipalité de Saint-Donat, et de Zoé Forest. Si on suit son cheminement un peu, elle entre au noviciat en septembre 1882. Deux ans plus tard elle fait profession et adopte le nom de Marie-Pauline. À l’été 1887, elle reçoit l’obéissance pour la Colombie Britannique où elle exerce ses talents de cuisinière à l’hôpital Saint-Joseph.
LE DEPART. La grande aventure en Alaska commence en avril 1888 où, avec Soeur Marie-Joseph Calasanz et Soeur Marie-Etienne, elle quitte Victoria à bord du bateau à vapeur surnommé le “Saint-Paul”. Celui-ci fait une première escale à San Francisco. Après quelques jours de repos les religieuses reprennent la mer vers les îles Aléoutiennes pour Unalaska le poste de rencontre de tout le commerce du Nord. Elles sont logées par l’Alaska Commercial Company qui y a ses magasins et ses entrepôts. Pour démontrer l’importance du trafic commercial en ce nouveau coin de pays, on y négocie chaque année environ 50,000 peaux de phoques, d’ours, de chats sauvages, de renards, de loups, de castors, de martres ainsi que des objets confectionnés par les Inuits, du charbon et de l’or. De Unalaska, les religieuses se rendent à Sainte-Croix qui deviendra avec le temps Holy Cross. Après un périple de cinq mois, elles arrivent finalement le 4 septembre 1888. Grâce à la générosité d’un chasseur et aux talents culinaires de Soeur Marie-Pauline, leur premier repas est composé d’une soupe à l’oie, de deux oies bouillies et de biscuits de matelot. Le repas aura été cuisiné sur un poêle qui fait deux pieds carrés avec un tuyau de poêle qui n’est rien d’autre qu’une série de boîtes de conserve enfilées les unes dans les autres. Les jours suivants, on construit la cabane des Soeurs qui fera 30 x 40 pieds sur terre battue. Elle sera divisée en quatre pièces. La classe mesurera 9 x 12 et accueillera une quarantaine d’élèves. Les énormes travaux que nécessite l’installation de la mission épuiseront Soeur Marie-Pauline qui devra prendre du repos durant six mois. Elle supervisera quand même les travaux de son lit qu’on aura pris la peine d’installer près de la cuisine. Pour l’aider à prendre du mieux, on lui sert du vin de messe mélangé avec du jus de viande.

En 1890, Holy Cross ouvre les portes de son église. À cette époque deux autres missions sont dirigées par des Soeurs de Sainte-Anne, soit Nulato et Juneau. L’année 1890 marque également les voeux perpétuels de Soeur Marie-Pauline. Après avoir tant donné à cette mission, elle quitte en 1898 pour aller à Dawson au Yukon où elle y reste deux ans. En 1900 elle part pour Nulato. Six ans plus tard, sa santé chancelante l’oblige à se retirer en Colombie Britannique. Après 57 ans de vie religieuse bien remplie, elle décède des suites d’une hémorragie cérébrale le 8 novembre 1941 à l’âge de 83 ans. D’AUTRES JEUNES DONATIENNES CHEZ LES SOEURS STE-ANNE. Pas moins de sept nièces de Soeur Marie-Pauline entreront chez les Soeurs Ste-Anne, dont la seule à partir en mission sera Soeur Marie-Raoul, née Rose-Délima Brault fille de Almanzar et de Basilisse Sylvain. Entretenant une correspondance soutenue avec Soeur Marie-Pauline, Soeur Marie-Raoul ne tardera pas à quitter pour le missionnariat. En 1910, on la retrouve à Dawson où elle y enseigne en plus de travailler à l’hôpital Sainte-Marie. En 1924 elle devient supérieure à Nulato en Alaska et également enseignante. Le 12 février 1948, elle décède à l’âge de 63 ans.
Par ailleurs, quatre filles de la grande famille de John Ritchie et de Marie-Louise Brault répondront à l’appel de Dieu. Il s’agit de Rose Delima qui deviendra Soeur Marie-Rose-Thérèse, d’Alma, Soeur Marie-Bonaventure, de Alice, Soeur Marie-Louise et de Rose-Anna, Soeur Marie-Félis-de-Cantalice. Enfin deux filles de Omer Lavoie et de Emma Brault entreront en religion. Il s’agit de Claire, Soeur Marie-Claire-du-Sauveur et de Germaine, qui deviendra Soeur Marie-Pauline-de-Jésus. Cette dernière est la seule encore vivante aujourd’hui. Elle demeure à la maison mère à Lachine.
Dans mon prochain article, je vous décrirai la vie difficile de la mission de Holy Cross.
Vignette photo : En 1934, on célébrait les Noces d’Or de Soeur Marie-Pauline. Pour l’occasion, toutes ces nièces étaient présentes comme en faitfoie cette photo. Première rangée, de gauche à droite : Soeur Marie-Raoul, Soeur Marie-Pauline et Soeur Marie-Rose-Thérèse. Deuxième rangée, de gauche à droite : Soeur Marie-Pauline-de-Jésus, Soeur Marie-Louise, Soeur Marie-Bonaventure, Soeur Marie-Félis-de-Cantalice et Soeur Marie-Claire-du-Sauveur.

Source : Claude Lambert, anthropologue-historien, Journal Altitude 1350. Avril 1993